Contrecœur

Charles-Xavier Ménage, d'après R. Lecoq
Mise en ligne 2002

 

Le contrecœur est la partie verticale du fond de la cheminée ; par assimilation, on donne ce nom à la plaque de métal, de terre cuite et parfois de pierre dont la fonction est de protéger et de décorer cet endroit.  De plus, le contrecœur accumule et renvoie la chaleur.

Cet accessoire de l'âtre est aussi appelé plaque ou fond de cheminée, taque 1 ou plaque de taque, plaque de foyer, fond de la cheminée, contre-feu, contre-foyer, foyère, plaque foyère, ou platine 2

Entre la Loire et la Saône, les foyères furent longtemps exécutées en terre cuite; de même en basse Auvergne et dans le centre de la France (Mâconnais et Charolais).

Dans le Finistère, le contrecœur en métal est souvent remplacé par une dalle de granit.

Dans les Pyrénées, des contrecœurs rectangulaires sont constitués de bandes de fer forgé horizontales fixées par de gros rivets sur des montants verticaux terminés par un anneau de préhension.

Dans la région de Cahors, cet assemblage adopte une forme semi-circulaire.

Les dimensions des contrecœurs en métal (que nous avons eu l’occasion de voir) varient de 37 à 135 cm. pour les plaques carrées, et atteignent 190 cm. de longueur pour les rectangulaires.  L’épaisseur,  généralement de 2 à 3 cm., peut atteindre une dizaine de cm.

Cet accessoire n’est connu qu’à partir de la seconde moitié du XVe siècle et adopte une forme semi-circulaire ou ogivale. Dans les rares exemplaires conservés de cette époque, le champ est occupé par des écus ou des fleurs de lys.

Au XVIe siècle, les contrecœurs sont plus fréquents. La partie supérieure est à coins coupés, trilobée, ou en demi-cercle.  Le décor, fort saillant, figure des lions ou des dragons accostant les blasons du propriétaire, des scènes mythologiques ou des allégories.

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Contrecœur XVIe s.  - Un briquet s'y cache.  Trouvez-le !
Photo © Jean-Yves Leclercq. Pour autorisation de reproduction, contacter le présent site.

Au XVIIe siècle, la plaque devient plus épaisse et le bord supérieur, chantourné, est souligné par des guirlandes de fleurs ou de fruits. Sous Louis XIV, l’ornementation est symétrique et s’inspire de la mythologie guerrière.

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Contrecœur du XVIIe s. - © BMG
Dans la cheminée, dont la hauteur est limitée par une brayère,
pend une crémaillère cruciforme à l'élément central de laquelle est suspendue une marmite.
Sur la sole est posée une paire de landiers. Le bas du contrecœur représente des activités familiales
tandis que les côtés, ornés de feuillages et de fruits présentent les outils de cuisine :
plat, louche, seau, lèchefrite, gril, broche, etc.

Au XVIIIe siècle, la plaque est moins épaisse, le bord supérieur reste presque toujours droit; le décor s’inspire également de la mythologie mais avec une prédilection pour les scènes galantes ou les chinoiseries.
Sous Louis XVI, les dimensions diminuent : 37 à 40 cm. de largeur, avec un décor constitué de scènes champêtres ou d’attributs.
En 1794, la Convention décide de détruire ou du moins de retourner 3 les contrecœurs armoriés.

Au XIXe siècle, enfin, le décor s'inspire de l'actualité : girafe au jardin des plantes, envol du premier ballon, vélocipède.

Fabrication

Une matrice réalisée en bois ou en plâtre est imprimée dans le sable ; on coule ensuite la fonte en fusion dans le moule obtenu. Le contrecœur ancien peut également servir de matrice pour une nouvelle pièce 4.



Notes

[1] En Lorraine, le mur derrière le contrecœur est parfois percé d’une niche formant placard, fermée par une porte dans la pièce contigüe. Ce placard où on mettait le lait à cailler s’appelle taque et, par assimilation, le contrecœur porte également le nom de taque.
En Belgique francophone, le mot taque [ou take en wallon] est généralement utilisé. (CXM) - retour au texte

[2] Le nom de « bretagne », donné parfois au contrecœur, désigne le lieu de fabrication. (H. Havard, Dictionnaire) - retour au texte

[3] Il était de coutume dans le Luxembourg belge de retourner ou de placer à l’envers les taques qui changeaient de propriétaires. (CXM) - retour au texte

[4] Dans ce cas, le moulage obtenu rétrécit de quelques millimètres par rapport à l’original.  D’autre part, une analyse comparative permet actuellement de dater les objets en fonte de fer d’une manière satisfaisante. (CXM) - retour au texte


 

Bibliographie

  • Ministère de la culture, Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France.  Principe d'analyse scientifique.  Objets civils domestiques.  Vocabulaire typologique, Imprimerie nationale, Paris, 1984.
  • Raymond Lecoq, Les Objets de la vie domestique.  Ustensiles en fer de la cuisine et du foyer des origines au XIXe siècle, Berger-Levrault, Paris, 1979.
  • (de) Sigrid Theisen, Der eifeler eisenkunstguss im 15 und 16. jahrhundert, Rheinland - verlag GMBH, 3e éd., Köln, 1978